Peter Pan dans ta gueule

Aaaah l'enfance. Moment magique où, en tant que petits oisillons tout ébouriffés que nous sommes, la naïveté résiste encore et toujours face à l'envahissante réalité de la vie. On a beau avoir perdu quelques une de nos belles illusions - comment ça le Père Noël et la p'tite souris c'est les parents !? On m'aurait menti ?! - certaines persistent, s'accrochent et on se les traînent une partie partie de notre vie tel un rugbyman français pendu au short d'un Néo Zélandais parti applatir le ballon derrière la ligne. Ce n'est que quelques années plus tard qu'on se rend compte de l'erreur dans laquelle on s'était fourvoyé depuis tant d'années et que, la larme à l'oeil devant ce nouveau bout d'innocence perdu, on se dit "P'tain qu'est ce qu'on est con quand on est gosse ! "

Je me souviens qu'en primaire, en CE1 ou CE2, j'étais choqué par le comportement immoral de ma maîtresse qui nous photocopiait des exercices dans des bookins ou des fascicules. Or au dos des livres et fascicules qu'on avait, il était marqué "La photocopie tue le livre" avec un petit dessin où un éclair vient frapper le livre. Moi je croyais que le fait de photocopier électrocutait vraiment le livre et le reduisait en cendres. D'ailleurs c'était pour ça que toutes les photocopies étaient noires et qu'on avait du mal à lire ce qui y était écrit. Imaginez la détresse dans laquelle je me trouvais : j'étais quotidiennement témoin d'un horrible papicide (rien à voir avec la canicule). On maltraitait ces morceaux de cellulose recouverts d'encre et je ne pouvais rien faire. Ce n'est que plus tard avec l'apparition des 1ers CD gravés que j'ai eu un flashback et que j'ai compris la véritable signification de "La photocopie tue le livre". Avouez que cette phrase a de quoi impressionner.

Quand j'avais une dizaine d'années mon père m'a amené 2 ou 3 fois au salon du Bourget. J'aimais bien voir de grands avions, surtout les avions de guerre qui pouvaient voler super vite et porter vachement de bombes et de missiles (cf la dernière phrase du 1er paragraphe). Or une année il se trouvait que le fameux avion furtif américain, le F-117, y était exposé. Je me rappelle que dans le métro qui nous amenait au Bourget, j'entendais des gens parler du fameux avion invisible, qu'on allait le voir parce qu'il y était exposé. En silence je pouffais de rire en me disant "Eh oh z'êtes pas un peu bécassous vous ? Voir un avions invisible, pfff. Non mais l'autre il
doute de rien". Tout le monde disait que c'était un bijou technologique et comme pour moi les Américains étaient super forts je ne voyais pas pourquoi ils n'y seraient pas arriver. Et effectivement pour moi il était resté complètement invisible étant donnée la foule qui s'était amassée devant pour le voir. Mais je ne comprenais pas qu'il y ait tant de gens devant un truc
impossible à voir. Ce n'est que plus tard, au moment de la guerre du Golfe, que j'ai pu voir des images du F-117 à la télé et que j'ai appris qu'il était invisible seulement pour les radars. Pfff y sont nuls ces radars.

Je terminerai avec une petite cascade verbale d'un de mes grands cousins qui, étant bambin, avait compris "il vrogne" au lieu du mot "ivrogne". Ca avait donné lieu à un mythique "Eh papa, tu vrognes ?" qui marqua tout le monde à jamais. Depuis lors des repas de famille on ne dit plus "Qui veut du vin ?" mais "Qui veut vrogner ?".